vendredi 14 novembre 2014

L'arrivée des premiers blessés à Montargis (2)

Comme beaucoup de villes de l’arrière et du département du Loiret, Montargis reçus ses premiers blessés dans la dernière semaine d’août, le 24 Août ,dans la nuit à 3 heures du matin. Selon la chronique , voir le Gâtinais du 27, ce fut une dure journée et nuit. Toutes les édiles sont présentes à l'arrivée du convois, pour saluer ces « Héros ».


354 blessés furent débarqués cette nuit là et une noria de voitures fit la navette entre les quais de la gare et les différentes formations qui reçurent les blessés.



  Aux Etablissements hospitalier , il faudrait ajouter les infirmeries: non seulement celles de la gare qui possédait des lits mais aussi celle du dépot du 169e a Durzy et sans doute celle de Gudin.
  Compte tenu des capacités hospitalières des hôpitaux auxiliaires et de l'hôpital mixte, presque la moitié des lits sont occupés. Début septembre,la municipalité, demande alors de recevoir des listes des blessés pris en charge par les établissements.

  Ces documents n'ont pas la même présentation en fonction de l’établissement et de la personne qui les fournit, cependant, si le nom, le grade et l'unité sont toujours présents, d'autres informations manquent : la date d'admission, la date et le lieu de naissance, et bien sur le devenir, sont omis. Seul un des établissements nous donne cette dernière information. Ce ne sont que des listes de blessés en traitement à l'instant où l 'on dresse la liste. Pire pour l'hôpital mixte, on a même pas la date de la rédaction sur le document, seulement l'indication Liste 1. etc... Ce ne sont pas des registres d'admissions
Pourtant, malgré les lacunes de ces documents, on peut se faire une idée de la provenance des ces blessés et que furent les combats auxquels ils ont participé. En ne prenant que les premières listes de blessés de la première semaine de septembre 1914, on a constitué une base de 291 noms dont on va s'attacher à éclairer le devenir. Ces listes aux cotes, ,des archives municipales, s'étalent du début septembre à la fin de décembre. Il n'en n'existe donc que pour les premiers mois de la guerre, et vers la fin, on possède des listes de sorties et d’évacuations pour certaines formations.

Plusieurs questions se posent : 


Comment fut décidé la répartition
A ce jour, aucune trace dans les archives municipales , ni dans la presse locale nous permettent de répondre à cette question. 
Où sont passés les 63 blessés entre les 354 déclarés par le Gâtinais et les 291 que l'on retrouve couchés ? 
Soit des évacuations ont déjà été prononcées, ou des décès constatés, entre la date du 24 Août et les premiers relevés, hypothèse la plus probable.
L'hôpital N°2, du château, accueille dans sa première liste 6 Officiers, dont 3 Capitaines. Il est assez facile de repérer dans les JMO des Unités, à quelle date ils furent blessés. En effet, si tous les JMO ne présentent pas d'état nominatifs, ils citent toujours les noms des officiers, voire les circonstances dans lesquelles ceux ci furent atteints.
Autre réflexion, un train sanitaire sature les capacités hospitalière de Montargis à la moité  ce qui revient à dire, que Montargis ne peux « absorber » que 2 trains au maximum.

Quelles étaient les Unités ?



Plus de 71 unités différentes sont représentées, majoritairement elles proviennent  de l'infanterie. Dans le tableau ci contre, on a retenu que les unités qui ont au moins 3 blessés ou malades hospitalisés  dans nos hôpitaux.
Si on regroupe les unités en fonction de leur appartenance divisionnaire,en corps d'armée, une vision d'ensemble se dessine.
191 hospitalisés proviennent de 13 unités, 5 divisions, regroupées en 3 Corps d'armée.
Tous trois appartiennent à la seconde Armée ( Général de Castelnau),
La 74e division  de réserve travaille de concert dans cette opération aux flancs du 16e corps d'armée.

Ou combattait elles?
Grâce aux journaux de Marche et Opérations qui sont maintenant mis en ligne par le Service Historique des Armées à Vincennes, on peut se faire un idée relativement exacte de la provenance des Blessés. On essayera de plus de situer dans ces journées critiques où se trouvent les formations sanitaires de l'avant à savoir les ambulances divisionnaire, de corps ainsi que les Groupes de Brancardier. Dans cette fin de mois d’Août nous sommes encore dans la guerre dite de mouvement, plus exactement la bataille des Frontieres , en particulier le 19 et 20 Aout la bataille de Morhange , puis la retraite ordonnée par le Général de Castelnau, : Les 15e, 16e et 20 corps en cette fin de mois d'Aout protègent les flancs de Nancy et la Trouée de Charmes.
Les blessés nous arrivent le 24 Aout, compte tenu des temps de transport on peut considérer qu'ils furent blessés vers le 22 et évacués dans le même temps.

Quels types de blessures
La doctrine de l'époque du service de santé est d'évacuer le plus rapidement possible vers les zones de l’arrière les blessés afin de dégager la zone d'armée, Pour ce faire peu d'interventions sont pratiquées dans les Ambulances (Hôpitaux de l'avant), on étiquette, on empaquette, et on évacue  , « Il en résulte que nombre de ces blessés arrive déjà, de ce fait, à l'arrière, tardivement pansés, souvent suppurants1 »
Prosper Viguier2, Médecin chef de l'ambulance 8/18, tient des statistiques sur les admissions des soldats et des plaies qu'ils présentent.
Sur 807 admissions entre le mois le 27 septembre 1914 et la mi mai 1915 il nous présente le tableau suivant

1G, Delorme , Blessure de guerre, conseils aux chirurgiens, Compte rendu de l'académie des sciences, séance du 28 /9/1914

2P. Viguier, un chirugien dans la grande Guerre, privat, 2007 p:46

  Les plaies par armes blanches (baïonnettes) sont extrêmement rares, par contre les plaies dues aux éclats d'obus ou de grenades représentent le double des plaies par balles. Plus de 60 % des plaies atteignent les membres. Un quart touche la tête ou le cou, le casque Adrian n'est pas encore sur les têtes.
   Le total des plaies excédants le nombre d'admission, cela nous indique qu'un quart des blessés admis dans cette ambulance est porteur d'au moins deux plaies. Ce qui est fréquent avec les éclats d'obus.
  Cette statistique n'est là que pour illustrer l'arrivée de nos poilus sur Montargis. Étant entendu que les grands blessés au ventre ou à la tête ne sont pas évacués sur l’arrière. On se sait pas a cette époque résoudre les deux grands problèmes que sont le choc et l'infection.


  Le maillage du réseaux à cette époque nous permet d'entrevoir les deux grands itinéraires possibles, soit par le Nord en passant par Toul et Bar le duc, ou bien un itinéraire sud qui descend sur Epinal puis par Mirecourt rejoint Troyes. Toutes les variantes entre ces deux itinéraires sont évidement possibles. Les trains de ravitaillements et de troupe montants étant prioritaires, les trains d’évacuations devait attendre dans des régulatrices ou bien emprunter des itinéraires de contournement, dès lors plus long.
  Nos blessés arrivent donc le 24 Août dans la nuit, compte tenu de la vitesse des trains sanitaires à cette époque (25 km heure).
   Le train  (certainement improvisé) qui arrive à Montargis a donc été formé le 22 ou le 23 . La distance est d’environ 350 km en passant par Saint Dizier, Troyes, Sens, soit au moins 14 heures de route. Les trains sanitaires s’arrêtaient toutes les 6 heures dans les gares possédant une infirmerie (comme Montargis), pour permettre non seulement l'alimentation et les pansements des blessés, mais aussi de confier à ces formations sanitaires les blessés qui ne pouvaient poursuivre le chemin.

La suite dans un prochain billet

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